Sémantique...

La paléontologie (du grec palaios = ancien, on, ontos = étant, ou onta = les choses sont, enfin logos = discours) est la science des être vivants ayant existé au cours des temps géologiques et qui est fondé sur l'étude des fossiles. Ce terme est consacré depuis Ducrotay de Blainville (1830). Et pourtant, un autre terme avait été proposé bien avant par Dezallier d'Argenville (1755) pour désigner l'étude des êtres anciens : oryctologie (du grec oruktos = fossile, au sens de "minéral fossile", adjectif verbal de orussô = je creuse, je fouille), composition savante dont l'auteur était assurément trop en avance sur son temps.

Les tentatives des paléontologues de se démarquer des disciplines qui traitent des êtres actuels, jusqu'à suggérer la création du terme néontologie, ont échoué, car la paléontologie utilise de plus en plus les champs d'application des recherches en Biologie et en Ecologie.

Le mot ontologie, apparu au XVIIe siècle dans un ouvrage de Johann Clauberg, y désigne " la partie de la métaphysique qui s'applique à l'être en tant qu'être (Aristote), indépendamment de ses déterminations particulières". Cette science de l'être existe depuis que Parménide, philosophe grec né cinq siècles avant Jésus-Christ (voir Daniel Pajaud, 1989). Aujourd'hui encore, biologistes et paléontologues font bien de l'ontologie, au sens plein du terme, même si, mais de moins en moins, les uns et les autres n'empruntent pas les mêmes chemins pour tenter de résoudre certaines hypothèses.

Il n'y a donc plus d'opposition non seulement à la tendance bien compréhensible au raccourcissement des mots les plus usités dans notre société, mais aussi de rassembler des disciplines scientifiques utilisant des approches semblables, voire identiques.
Prenons le cas du mot écologie : proposé par le naturaliste allemand Ernst Haeckel en 1866, le mot Ökologie (du grec oikos = habitat, maison et logos = discours), devenu œcologie puis écologie en français, désigne l'"étude des milieux où vivent les êtres vivants ainsi que les rapports de ces êtres entre eux et avec leur milieu de vie".
Si les études menées sur les milieux de vie anciens sont désignées sous le vocable paléoécologie (terme proposé en 1916 par le botaniste F. E. Clément), il ne s'agit en fait que d'écologie même si les êtres vivants sont des fossiles, tout en évitant certaines confusions comme rapporter le substrat dans ou sur lequel vivent ou vivaient des êtres vivants à la lithosphère. Les objectifs sont communs et l'échelle du temps est, plus qu'on le pensait, très proche.

Finalement, le petit préfixe paléo change peu de choses, en tout cas beaucoup moins que d'aucun le voudrait !

Christian C. Emig

Henri Ducrotay de Blainville, naturaliste français, suppléant de Georges Cuvier, dont il combat les idées et à qui il succède en 1832 dans la chaire d'anatomie comparée au Muséum.

Antoine Joseph Dezallier d'Argenville, naturaliste et historien d'art français, auteur d'une Histoire naturelle.

Daniel Pajaud (1989), Nomenclature et taxinomie. Pratiques de la dénomination et usage des concepts en ontologie.

Johann Clauberg, philosophe allemand préoccupé par les rapports du corps et de l'âme (Corporis et animae in homine conjunctio, 1663).