Références 119 & 121.

119 Odin, G.S., Auvray, B., Bielski, M., Gale, N.H., Lancelot, J.R. & Pasteels, P., 1982. La base du Phanérozoïque est âgée de 520 à 540 Ma. C. R. Acad. Sci. Paris, 294: 1009-1012.
121 Odin, G.S., Gale N.H., Auvray B., Bielski M., Doré F., Lancelot J.R. & Pasteels P., 1983 Numerical dating of Precambrian-Cambrian boundary. Nature, 301: 21-23.

 

Présentation/discussion :

Ces travaux sont les premiers de la littérature à proposer un âge maximal de 540 Ma (non 570 à 600 Ma admis jusque là) pour la base du Phanérozoïque. Il oblige à envisager une vitesse initiale, très rapide, pour l'évolution biologique des invertébrés à squelette ce qui fut souligné par ailleurs (extrait de la conclusion de la référence 120 sur la nouvelle échelle du Phanérozoïque -traduction de l'anglais:
"L'une des plus importantes nouveautés est la datation des limites du Système Cambrien… La base fut datée indirectement par des roches du socle stratigraphiquement bien localisées en Angleterre, France, Maroc et au Sinaï. La cohérence remarquable de ces résultats… conduit à la conclusion que la base du Système ne peut être plus ancienne que 540 Ma… Ce nouveau résultat… a d'importantes implications pour l'histoire de l'évolution biologique puisque le Cambrien a vu l'essentiel de la différenciation des phyllum d'invertébrés.".
Cet âge nouveau fut difficile à faire admettre; en particulier, la publication en langue anglaise a été refusée à plusieurs reprises. Il faudra plus de 10 ans pour que ce changement soit accepté à la suite de nouvelles études confirmant les résultats présentés ici. Plusieurs études récentes éviteront d'ailleurs de citer nos conclusions… (Voir article Libération 1993 p. 3)

Résumés :

Résumé119: Une convergence remarquable existe entre les résultats de datation obtenus récemment concernant des roches magmatiques situées sous des sédiments d'âge Cambrien inférieur. Ces mesures, effectuées par les méthodes Rb-Sr ou U-Pb essentiellement, conduisent à proposer un âge de 530 ±10 Ma pour le début des temps phanérozoïques.
Résumé121: Bien que la base du Phanérozoïque soit une date importante de l'histoire biologique comme de la croûte terrestre, peu de datations définitives étaient disponibles pour estimer l' âge numérique de cette limite. Cependant des résultats modernes, précis et dignes de confiance, existent maintenant; les âges radiométriques pertinents sont récapitulés ici et l'on montre qu'ils conduisent à un âge bien plus jeune qu'il n'était admis pour la limite Précambrien-Cambrien. (voir figure)

 

Extrait de Libération
Mercredi 10 Novembre (p. 31)

RADAR
Voilà deux mois, on s'était ému de la brusque envolée des invertébrés il y a un demi-milliard d'années (lire Libération 15/9/93). Pas totalement par hasard. Mais parcequ'une équipe américano-russe venait de publier un article enthousiaste dans le magazine américain Science. Après enquête en Sibérie et nouvelles méthodes d'analyse, les scientifiques avaient constaté que la fameuse explosion du Cambrien avait pu être trois ou quatre fois plus rapide que ce qu'on racontait jusqu'à présent: autrement dit, les trilobites, oursins, éponges et autres coquillages auraient déferlé sur la planète en cinq à dix millions d'années seulement.
Tout ça c'est bien joli, mais voilà longtemps que je dis peu ou prou la même chose, nous a fort gentiment signalé le directeur de recherche au CNRS Gilles Serge Odin. Et de nous faire parvenir quatre documents à ce sujet, dont une publication dans la revue Episodes en 1982. Il y est écrit en anglais (nous traduisons) que "l'une des découvertes les plus importantes concerne la datation des limites du Cambrien. La limite supérieure (…) remonte probablement aux environs de 495 millions d'années (…) Quant à la base, elle ne peut être plus ancienne que 540 millions d'années. Un âge beaucoup plus récent que ce qui était proposé auparavant (…)" Et Gilles Odin d'en tirer à l'époque une leçon voisine de celle évoquée récemment dans Science: "ce nouveau résultat (…) a d'importantes implications pour l'histoire de l'évolution biologique (…) Si la durée (du Cambrien) a effectivement été de l'ordre de 35 millions d'années, la vitesse d'évolution aurait alors été plus rapide que lors d'époques ultérieures". Le seul tort du chercheur français, c'est apparemment d'avoir eu raison trop tôt - ses premières publications sur le sujet ont d'ailleurs été refusées par des journaux célèbres, nous a-t-il confié. "Ce n'est qu'entre 1990 et 1993 que cette 'découverte' a commencé à être reconnue", soit dix ans plus tard. "Encore que certains auteurs négligent de se référer à cette antériorité pour des raisons, disons propres à la nature humaine", nous écrit-il avec philosophie. …

DOMINIQUE LEGLU