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EMIG C. Christian
BrachNet
20, rue Chaix
F-13007 Marseille

* Directeur de Recherches
Honoraire CNRS

 

 

English version

 

 

Introduction

Année civile

Calendrier grégorien

Calendrier révolutionnaire

Les Registres

Les Noms

Les Prénoms

Références et Liens

Notes


APPENDICE 1
Du calendrier julien
au grégorien

APPENDICE 2
Les patronymes anabaptistes
et leurs variantes

 

Citation

 

Version

 


  • Ceci est la 2e édition (2021 - modifiée et complétée) de l'article publié en 2015.

  •  

    De la généalogie protestante en Alsace... quelques remarques et conseils

     

    Christian C. Emig *

    [Résumé]            

    Version            

     

    Introduction

    Les Protestants ont une culture allemande plus marquée que dans les autres religions en Alsace, car en grande majorité luthériens de la Confession d’Augsbourg, la langue ecclésiale dans tous les actes était l’allemand, depuis la Réforme induite par Martin Luther et sa traduction de la Bible, imprimée par Gutenberg. L’introduction de culte bilingue ne se fit que dans les années 1950 ! Je me souviens du premier culte bilingue à Colmar, uniquement le sermon se fit en français.

    Pendant presque un millénaire, l’Alsace, terre allemande, a fait partie du Heiliges römisches Reich deutscher Nation (traduit en français par Saint Empire romain – mais pour être complet il faut ajouter de la Nation allemande) depuis la création le 2 février 962 par Otto Ier, ainsi que partiellement du IIe et IIIe Reich. Les généalogies alsaciennes suivent ainsi les usages allemands jusqu'au début du XIXe siècle, puis de 1871 à 1919 et de 1939 à 1944, usages dont certains subsistent aujourd'hui encore dans le cadre du droit local alsacien, incluant le concordat napoléonien de 1801 et la non-application de la loi française de 1905 sur la laïcité. L’appartenance religieuse des ascendants est une information primordiale qui conditionne fortement les recherches généalogiques. Exceptionnels sont les mariages « mixtes ». A noter aussi que contrairement à la France, les protestants n’étaient pas minoritaires dans l’Empire allemand et même un empereur (élu) catholique devait toujours composer avec les princes protestants. Ceci a conduit Charles-Quint à promulguer en 1555 le Cujus regio, cujus religio (tel prince, telle religion) à la demande des Luthériens.

    La bonne connaissance de l’Histoire de l’Alsace et celle de la langue écrite des Alsaciens, l’allemand (Hochdeutsch, toujours langue officielle en Alsace) est un prélude pour aborder avec sérénité des recherches sur les ancêtres alsaciens (Emig, 2012, 2014a). Le présent texte regroupe des connaissances acquises lors de mes recherches sur les familles de mes lignées ancestrales toutes protestantes dans les possessions de princes et seigneurs protestants, notamment celles des ducs de Wurtemberg (seigneuries de Riquewihr et de Horbourg, comté de Montbéliard), celles du seigneur de Rappolstein, puis du Duc des Deux-Ponts à Ribeauvillé, les différentes possessions dans le Ried et tout au Nord de l’Alsace surtout celles près de la frontière palatine de la baronnie des Fleckenstein habitant le château du même nom, sans oublier les villes libres de la Zehnstädtebund (Décapole alsacienne), notamment Colmar, Munster, Wissembourg. L'Alsace n'a jamais appartenu à un seul prince ou roi, mais a toujours été un patchwork de possessions, traduisant une unité dans la diversité, dans une même culture. Sa vraie frontière n’a jamais été le Rhin mais la « ligne bleue » des Vosges (Emig, 2012).

    Année civile

    Avant le milieu du XVe siècle, l'année civile commençait généralement à Noël, le 25 décembre, parfois déjà le 1er janvier, mais aussi le 25 mars dans le comté de Montbéliard jusqu'en 1564. A partir du règne de Ferdinand Ier (1558-1564), on adopta peu à peu partout le 1er janvier, pour éviter des disparités fâcheuses d'un territoire du Saint Empire romain germanique à l'autre (Tabl. 1).

    Français

    Deutsch

    English
    janvier Jenner, Jänner, Hartung Januar January
    février Hornung Februar February
    mars Lenzmonat, Frühlingsmonat März March
    avril Ostermonat, Osteren April April
    mai Wonnemonat, Blütemonat Mai May
    juin Brachmonat Juni June
    juillet Heumonat, Heuert Juli July
    août Emtemonat, Hitzmonat August August
    septembre  ou 7bre Herbstmonat, Fruchtmonat, Herpsten, , 7bris September September
    octobre ou 8bre Weinmonat, 8bris Oktober October
    novembre ou 9bre Wintermonat, 9bris November November
    décembre ou Xbre, 10bre Christmonat, Xbris, 10 bris Dezember December

    Tableau 1. - Comparaison des dénominations des mois selon les langues et les époques.

    Du calendrier julien au calendrier grégorien

    En Alsace, l'adoption du calendrier catholique Grégorien se fit entre 1583 et 1603 dans les possessions catholiques et plus tardivement dans les paroisses protestantes, car imposée par le Vatican : le passage du calendrier Julien au grégorien sera fera entre 1682 et 1701 selon les paroisses, elles voulaient aussi distinguer les fêtes religieuses entre luthériens et catholiques (voir Appendice 1). En Suisse alémanique (protestante), il faut attendre entre 1700 et 1812. Ainsi, une différence entre 10 à 12 jours peut donc intervenir, d’autant que les logiciels français comme Heredis imposent la date catholique française de 1583 (voir Appendice 1).

    Calendrier républicain ou révolutionnaire

    Ce calendrier est une exception française, imposée dans les actes officiels même en allemand. Le calendrier républicain a sévi en Alsace du 22 septembre 1793 au 31 décembre 1805. Il commence par l'an II, parce qu'on a considéré a posteriori que l'an I couvrait la période de septembre 1792 à septembre 1793. Cette dernière date est celle qui correspond généralement au début des registres d’Etat-Civil qui sont en allemand selon les communes parfois jusqu’en 1806 et plus, seules les grandes villes ont utilisé le français.

    Dans certaines communes, notamment en Basse Alsace, les mois révolutionnaires ont été traduits en allemand – bon à connaître quand on y est confronté (Tabl. 2).

    Mois révolutionnaires Elsäßer Monat Dates
    vendémiaire Weinmonat 22 septembre ~ 21 octobre
    brumaire Nebelmonat 22 octobre ~ 20 novembre
    frimaire Frostmonat, Reifmonat 21 novembre ~ 20 décembre
    nivôse Schneemonat 21 décembre ~ 19 janvier
    pluviôse Regenmonat 20 janvier ~ 18 février
    ventôse Windmonat 19 février ~ 20 mars
    germinal Knospenmonat, Keimmonat 21 mars ~ 19 avril
    floréal Blütenmonat, Blumenmonat 20 avril ~ 19 mai
    prairial Wiesenmonat 20 mai ~ 18 juin
    messidor Erntemonat 19 juin ~ 18 juillet
    thermidor Hitzmonat 19 juillet ~ 17 août
    fructidor Fruchtemonat 18 août ~ 16 septembre

    Tableau 2. - Comparaison des dénominations des mois révolutionnaires en français et alsaciens en allemand. Les 6 jours complémentaires de fin d'année (fin septembre) ne sont pas mentionnées. À ne pas confondre avec les mois habituels - voir Tableau 1.

    Les registres

    Les registres paroissiaux protestants sont en allemand et en écriture gothique (Tabl. 3). Des exemples de différentes écritures gothiques sont représentés dans les deux tableaux ci-dessous (Tabl. 4  et 5). Les spécificités paléographiques et linguistiques des actes alsaciens représentent pour de nombreux généalogistes non germanophones un obstacle à la recherche.

    Périodes Écritures (polices)
    XVe siècle  Textura
    (a)
    fin XVe siècle Schwabacher
    début XVIe s. Fraktur
    (b)
    XIXe siècle Kurrent
    vers 1918 Sütterlin
    depuis 1941 Antiqua (typographie)
    Normalschrift (manuscrite)
    (c)

    Tableau 3. - Principales étapes des écritures gothiques allemandes. (a) type de caractères utilisé dans l’imprimerie (édition de la Bible) ; (b) utilisation jusqu’au milieu du XXe siècle ; (c) Abandon de l'écriture gothique par décret d'Adolf Hitler en 1941.

    Tableau 4. – Les trois écritures gothiques : Kraktur, Sütterlin, Kurrent (voir aussi Tabl. 5).

    Tableau 5. – Allemand gothique en écriture Kurrent.

    L'état civil qui commence généralement en 1793, est rédigé en français dans les grandes villes, mais en allemand (gothique) dans la plupart des villages et bourgs, jusqu’au début des années 1800. La raison en est que moins de 5 % de la population alsacienne connaît le français, le parler alsacien (alémanique ou francique) et l’allemand, la langue écrite, sont d’un usage courant jusque dans les années 1950.

    Ce n’est qu’en 1859 que l’enseignement du français devint obligatoire en Alsace. Une dizaine d'années après, l'Alsace redevient allemande avec retour aux actes en allemand (de 1871 à 1919), puis de 1940 à 1945. A noter que, contrairement à ce qui se « racontait » en France, la pratique de l'allemand n'a jamais été imposé aux Alsaciens, puisqu'elle a toujours été leur langue maternelle - ce aussi mon cas, toute ma génération a appris le français à l'école primaire.

    Le français a été utilisé cependant dès 1793 dans les communes welsches (francophones) appartenant à l'Alsace, comme dans l'actuel Territoire de Belfort et dans les vallées vosgiennes de la Weiss, de la Lièpvrette, du Giessen et de la Bruche. Note : Welsch, en allemand, signifie « étranger parlant une langue non-germanique ».

    Les Noms

    En matière d'onomastique, il n'y a guère de différences entre les noms alsaciens et les noms allemands. Ceci est d'autant plus évident que nombre d'ancêtres ont émigré en Alsace à partir d'autres régions allemandes ou suisses, notamment après la guerre de Trente-Ans (Fig. 1). Les modifications des noms de famille dans le temps restent exceptionnelles, en tout cas dans nos familles. Ce maintien patronymique est également valable dans les branches émigrantes notamment aux Amériques (USA, Canada).

    Fig. 1. - Dessin de Phil (publié avec son aimable autorisation)

    Contrairement aux motifs généralement avancés, comme la transcription orale par l’administration étatsunienne, les immigrants Wohlhüter, Nadelhoffer, Wölfersheim, Sturm n’ont pas vu leur patronyme changé, souvent avec maintien de l'umlaut, jusqu’à nos jours ! Il me semble que ces modifications sont en fait liées à l'illettrisme autant du porteur du nom qu'à l'agent d'immigration ou d'état-civil. Pour nombre de généalogiques, le nom de famille ne peut supporter de changement dans les arbres : c'est un point technique dans les logiciels de bases de données ; aussi est-il convenu d'utiliser le nom courant actuel (depuis 1800) dans l'ensemble de l'ascendance afin de s'assurer d'un arbre ascendant et descendant complet. Si nécessaire, un changement pourra être mentionné si votre logiciel prend les variantes en compte, comme la dernière version d'Heredis.

    Cependant, les noms de familles anabaptistes sont un cas particulier avec des variantes jusqu'entre enfants au sein d'une même famille (voir Appendice 1). Ceci rend évidemment les recherches dans une base de données généalogiques particulièrement difficiles, voire stériles[1]. En outre, l'origine ancestrale devient douteuse, car le lien père-enfant n'est plus assuré notamment dans les ascendances antérieures au XIXe siècle en cas d'émigration aux USA où les registres n'existent que depuis le XXe siècle. Seule la Bible de famille est alors un secours !

    Dans les registres paroissiaux, la féminisation du nom se faisait par adjonction de "-in", ou de "-n" lorsque le nom se termine en déjà par "i" ou "ÿ" [2] (par ex. Wohlhüter et Wohlhüterin). Cette forme est souvent à l’origine d’erreur de transcription en considérant comme patronyme cette forme féminine. Cette pratique prend fin avec la mise en place de l’Etat-Civil, en même temps les patronymes prenaient leur forme définitive et invariable. C'est la loi du 6 Fructidor an II (23 août 1794) qui interdira à tout citoyen de porter d'autre nom et prénom que celui inscrits sur son acte de naissance. Par ex. Wilfersheim devient ainsi Wölfersheim. Pour mon propre patronyme, l'ancêtre est venu de Lüterswil (Canton de Solothurn, Suisse) à Mittelwihr (Alsace) à la fin du XVIIe siècle, où il s'est marié sous le nom Emmich, le patronyme d'origine (celui de son père) étant Ämch ou Emch toujours en usage en Suisse, et la transformation définitive en Emig après deux générations.

    De l’umlaut (Umlaut en allemand): il désigne la marque diacritique composée de deux petits traits verticaux placés au-dessus d’une voyelle pour indiquer la métaphonie. Attention à ne pas confondre l'umlaut et le tréma en français, qui est, quant à lui, constitué de deux points. Il modifie le son de plusieurs voyelles : a o u, y ; dans l’imprimerie, en l’absence d’umlaut ces lettres sont remplacées respectivement par les digrammes : ae oe ue qui ne font que traduire un son. En Allemagne, ces dernières formes ont été définitivement supprimées dès le début du XXe siècle par l’umlaut. C’est une orthographe archaïsante que l'on trouve encore dans les pays (USA; Canada...) ne disposant des caractères à diacritiques dans leur imprimerie et ordinateur ! En France avec l’usage de l’ordinateur il en est de même, l’usage de l’umlaut est devenu une obligation typographique en français. Les digrammes doivent être remplacés par des lettres avec umlaut : on ne doit plus écrire Schuerch mais Schürch, Wohlhueter mais Wohlhüter - en aucun cas ni Schurch ou Wohlhuter. Avec un ordinateur, cela ne pose aucun problème, alors respectons les patronymes originaux de nos ancêtres. Il faut aussi rappeler que les accents doivent obligatoirement être mis sur les lettres en majuscule.

    La ligature en français  Œ/œ, dite « e dans l’o », ou Æ ou ae, est latine et n’existe pas en allemand – une erreur souvent commise en France. Par ex. le village Röschwoog s’écrit aujourd’hui officiellement Roeschwoog, mais Michelin ou Wikipedia parmi d’autres l’écrivent Rœschwoog.

    De l’origine du patronyme : le patronyme d’une famille est généralement d’une origine unique, souvent sans rapport avec le même patronyme d’une famille même voisine, parfois seulement distante de quelques km. Il faut donc remonter vers le XIIe-XIIIe pour connaître l’explication et l’origine du nom. Et, pourtant, bien des généalogistes pensent sans aucun fondement que origine et explication de leur nom se trouvent dans des ouvrages généralistes et pire que le patronyme est unique et donc que tous les porteurs de ce nom sont de la même famille, une tendance très américaine, mais pas seulement ! Surement tous descendants d’Adam et d’Eve. Il s’agit toujours de démontrer, et non de recopier (appelé aujourd'hui copier-coller !) ce qui conduit souvent à des erreurs.

    Ces remarques confirment combien chaque nom de famille est un cas particulier qui ne peut s'assimiler à un cas général. Cela a été fait trop souvent expliquant combien de fausses interprétations continuent à être propagées et à induire en erreur des généalogistes crédules et aussi ignorant des spécificités alsaciennes et allemandes qui ont été soigneusement cachées dans les cours d'Histoire... de France, en commençant par ces rois francs, donc allemands et parlant l'allemand moyen (Mitteldeutsch), qui ont conquis et occupé la "France" et qui sont considérés aujourd'hui comme rois de France ! dont les Merowinger dits mérovingiens, les Karolinger dits carolingiens... et autres Kapetinger dits capétiens.

    Enfin, dans un cadre très général, il ne faut jamais négliger la contribution – à 50% ! – qu’apporte le conjoint et son nom dans une recherche généalogique, parfois insoluble sans cet apport plus que complémentaire. De tradition allemande ou suisse, le nom s’attribue à une famille pour la distinguer des autres familles composant un groupe social. En généalogie, chaque époux conserve son patronyme toute sa vie ; c'est aussi le cas officiellement en France et en Allemagne. Ailleurs, il y a parfois collusion entre l’usage sociétal et l’usage officiel, c’est évidemment une erreur en généalogie.

    Prénoms

    La plupart des enfants possèdent deux prénoms en Alsace : le premier est celui dit de la famille, et le deuxième est celui propre à l’enfant, donc l’usuel. La dénomination à utiliser est celle indiquée exclusivement sur l’acte de naissance et dans la langue de cet acte. Dans d'autres actes, comme ceux de mariage ou de décès, seul le prénom usuel est souvent indiqué. Les données fournies par l'acte de naissance doivent être recherchées afin de vérifier l’identité réelle de la personne ; cela vaut aussi pour les parents dans tout acte. Une identité partielle est souvent source d'erreur ou de confusions, d’autant qu’en France le premier prénom est généralement l’usuel. Dans les recensements, seul prénom usuel était généralement mentionné.

    d'après l'acte de naissance prénom usuel US ranking
    grand-père Johann Martin Martin John I
    père Johann David David John II
    fils Johann Michael Michael John III
    d'après l'acte de naissance prénom usuel
    grand'mère Maria Catharina Catharina
    mère Maria Margaretha Margaretha
    épouse Anna Margaretha Margaretha

    Table 6. – Exemple de prénoms sur trois générationsd'Alsaciens. Le prénom usuel est généralement le seul utilisé dans les actes de mariage, de décès, et les recensements. La retranscription donnée par des généalogistes étatsuniens est en colonne 4 ; en outre, seul le prénom est fourni pour les épouses (qui portent de nom de famille de leur époux et non le leur propre) ce qui empêche toute généalogie ascendante.

    La traduction d’un prénom allemand en français ou en anglais souvent obère l’usage au sein de la famille. En effet, Johann, Johannes, Hans, Hanss… ne peuvent se traduire en français que par Jean ; or, en allemand, chacun de ces prénoms est spécifique, distinct de l'autre, et permet de distinguer deux personnes au sein de la famille entre frères, sœurs ou cousins germains. Ceci vaut pour d’autres prénoms comme Catharina, Kathrina, Catherina…, Michel ou Michael (pas d’umlaut ici !). À ne pas connaître ou mal les us et coutumes locales conduit à faire des erreurs et les transmettre. Un autre point souvent négligé est le surnom pour les hommes : der Alte, der Mittere, der Junge. Or, ce surnom change dans le temps, car au décès du "Vieux" (Alte) c'est le "Moyen" (Mittlere) ou le "Jeune" (Junge) qui s'appelera Alte dans un acte. Ensuite ce surnom n'est pas toujours du père à son fils ou petit-fils, mais parfois au cousin germain. Donc au combien la généalogie est une histoire de famille !

    Dans la culture alsacienne  (allemande), la tradition veut que le prénom soit indiqué avant le nom de famille. On appréhende ici les différences entre alsaciens  (de culture allemande) et français (de culture latine), ainsi que les lacunes historiques qui laissent souvent penser que les alsaciens sont des français ! Certes aujourd’hui de nationalité, mais pas de culture [3].

    Références et Liens

    Archives départementales du Bas-Rhin, en ligne : Registres paroissiaux et d'état civil, Recensement, Émigration, Cadastre... https://archives.bas-rhin.fr

    Archives départementales du Haut-Rhin, en ligne : Registres paroissiaux et d'état civil, Recensement, Cadastre... https://archives.haut-rhin.fr/search/home

    Archives départementales du Territoire-de-Belfort, en ligne : Registres paroissiaux et documents d'état civil, Recensement, Cadastre... https://archives.territoiredebelfort.fr/   -   Nota : le Territoire de Belfort appartenait à l'Alsace jusqu'en 1871.
    - voir aussi Association LISA http://www.lisa90.org/lisa1/pages1/accueil.html.

    Duvignacq M. A., Marie Collin M. & E. Syssau (2011). Vous cherchez quelqu'un ? Archives et généalogie - Lire les actes. Archives départementales du Bas-Rhin, Strasbourg, 30 p.

    Emig C. C., 2012. Alsace entre guerres et paix. In : Faire la guerre, faire la paix : approches sémantiques et ambiguïtés terminologiques. Actes des Congrès des Sociétés historiques et scientifiques, Éd. Comité des Travaux Historiques et Scientifiques, Paris, p. 195-207.

    Emig C. C., 2014a. Quelques réflexions sur la Généalogie et sur son usage. Nouveaux eCrits scientifiques, NeCs_03-2014, 11p.

    Emig C. C., 2014b. Généalogie Graber en Franche-Comté. Nouveaux eCrits scientifiques, NeCs_02-2014, p. 1-15.

    Emig C. C., 2021. Alsace. http://emig.free.fr /ALSACE/index.html. Consulté le 20 juin 2021.

    Geneafrance 2014. Recherches en Alsace. Consulté le 20 juin 2021.

    Marthelot P., 1950. Les mennonites dans l'Est de la France. Revue de géographie alpine, 38 (3), 475-491.

    Nègre X., 2021. Lexilogos. Dictionnaires alsaciens. . Consulté le 20 juin 2021.

    Hug M., 2014. Orthographe de l'alsacien. http://elsasser.free.fr/OrthAls/. Consulté le 20 juin 2021.

    Kasser-Freytag D., 2015. Manuel de paléographie alsacienne. Archives & Culture, Paris, Collection Guides de Généalogie, 160 p.

    Prou M., 1924. Manuel de paléographie latine et française. Picard, Paris, 4e éd., 511 p.- pdf de l'édition 1890, 397 p.

    Theleme. Dictionnaire des abréviations françaises, http://theleme.enc.sorbonne.fr/dico, consulté le 20 juin 2021.



    Notes :

    [1] Une anecdote - un jour, je reçois un message d'une cousine étatsunienne née Miller, du Erie Co (New-York State) qui me demande de l'aider dans la recherche de ses ascendants, car elle ne les trouve pas alors que l'acte de naissance donne date et lieu dans un village bas-rhinois bien identifié. Surpris je plonge dans les actes et trouve toute son ascendance à partir de l'ancêtre nommé... Müller !! Bien sûr de Miller- Müller, c'est une histoire de meunier.

    [2] En allemand, le y est une voyelle quand il représente le son "ü" ou "i" ; dans ce dernier cas, il s’écrit souvent avec un umlaut : ÿ et peut aussi se remplacer par un i.

    [3] En devenant allemand ou redevenant français au cours des siècles précédents, l'indigène devait démontrer qu'il était alsacien depuis au moins trois générations. Aujourd'hui, il suffit de naître en Alsace pour prétendre au terme Alsacien, sans avoir aucune culture locale, encore moins linguistique ! Cela vaut pour tout le territoire français. C'est aussi cela que les indigènes alsaciens remettent en question. 
Nota : en Alsace, l'indigénat n'est pas du tout péjoratif, bien au contraire car il marque son appartenance historique à un lieu, une région - voir Annuaire de la Commission du Droit International (1997), vol. 2, 1e partie, Documents de la 49e session (ONU), p. 34 et 55.
Rappelons aussi la différence dans l'identité national entre le droit du sol (français) et le droit du sang (allemand) auquel il a été ajouté en 2000 un droit du sol pour les étrangers de 3e génération sur le sol allemand.

     



    Le passage du calendrier julien au calendrier grégorien n'eut pas lieu au même moment partout dans l'Europe, ce qui peut aujourd'hui encore causer des confusions dans les dates en généalogie, surtout en absence de sources religieuses.

    Demandée par le concile de Trente (1542-1567), le changement intervint au moment des guerres de religion. Le refus d'adopter le nouveau calendrier grégorien était principalement fondé sur une opposition politico-religieuse à la papauté : principalement par les États protestants, parfois avec véhémence, et du monde orthodoxe dans son ensemble. Il s'étale sur plus de deux siècles.

    Le passage s'est fait sur la base d'un rattrapage de 10 à 12 jours (en 1582 la différence vraie était de 12,7 jours). Comme nombre de royaumes catholiques (Italie, Espagne, Portugal... le 4 octobre 1582), la France adopte le calendrier grégorien le 9 décembre 1582. Mais, à cette époque, la France n'était pas dans les limites d'aujourd'hui.

    De grandes variations dans l'application chez les protestants, et parfois aussi chez des catholiques... sur une période de plus de deux siècles ! En généalogie, ceci peut entraîner un intervalle dans les dates des actes d'environ 10 jours, surtout si la source avec la religion n'est pas mentionnée.

    Saint-Empire

    L'Alsace protestante, à la fois les possessions et les paroisses, ainsi que les possessions du duché de Wurtemberg en Franche-Comté, décidèrent d'appliquer le calendrier grégorien le 5 janvier 1682, suivi du 15 [sauf Mulhouse le 1er janvier/12 janvier 1701, car faisant partie de la Confédération Suisse].
    À titre d'exemple (Fig. 2) : dans les registres de Riquewihr, duché de Wurtemberg (pas de registres catholiques avant 1685), les actes entre août et décembre 1681 portent les dates julien/grégorien, puis à partir du 5 janvier 1682 les dates suivent le calendrier grégorien.

    Fig. 2. - Ci-dessus, l'acte de décès d'un de mes ancêtres Hanß David Binder [Sosa 2248 - G12], enterré le 5/15 novembre 1681- voir le registre de décès de Riquewihr.

    Dans le duché de Lorraine, le passage attendra le 16 février 1760 est suivi par le 28 février 1760.

    À Augsbourg, appartenant au Cercle Impérial de Souabe (Schwäbischen Reichskreis), biconfessionnelle depuis 1555, les fronts religieux étaient déjà particulièrement durcis. Alors lorsque la majorité du conseil municipal s'est prononcée en faveur du calendrier grégorien en 1584 et a aussi recruté des troupes, la situation a atteint son paroxysme. Les prédicateurs évangéliques ont refusé d'adhérer au calendrier papal ; dans une ville au bord de la guerre civile, le 3 juin 1584, ils ont appelé à célébrer le jour de l'Ascension qui était imminent selon l'ancien calendrier. Le conseil a interdit immédiatement cette célébration et a voulu se débarrasser de l'agitateur le plus bruyant Georg Müller et l'a fait expulsé. L'émeute a donc éclaté le 4 juillet.
    Par la suite, un calme tendu revient à Augsbourg. Au cours des années suivantes, les dirigeants ont réussi à mettre en œuvre le nouveau calendrier dans la mesure du possible. Mais des années plus tard, si certains protestants utilisaient le nouveau calendrier, beaucoup célébraient les fêtes de l'église selon l'ancien. Aussi, quand le roi de Suède Gustav Adolf a conquis Augsbourg en 1632, la ville est immédiatement revenue à l'ère julienne.
    Après la guerre de Trente-Ans, vers 1653, le préjugé des protestants est encore en partie tenace. Dans la lettre de David Thomann von Hagelstein (1624-1688) (Fig. 3), un cousin luthérien et evangelischer Ratskonsulent (= Stadtschreiber ou échevin au conseil), la date est en julien/grégorien : 14/24 1674, confirmant que la ville n'a pas encore adoptée le calendrier grégorien ; je n'ai pas réussi à trouver la date. À noter que Nuremberg, ville libre d'empire, n'est passée au calendrier grégorien qu'en 1699.



    Fig. 3. - Extrait en fac-similé du bas de la p. 3, d'une lettre de 4 pages, fermé par un sceau, écrites à Augsbourg par David Thomann.

    Suisse protestante

    La plupart des cantons réformés de Suisse, comme Bâle, Berne, Genève, Schaffhouse, Zurich, adopte le nouveau calendrier au 1er janvier/12 janvier 1701.
    La ville de Saint-Gall et la partie réformée du canton de Glaris en 1724 (la partie catholique en 1700).
    Le canton Appenzell 14/25 décembre 1798.
    Le canton des Grisons en 1812.

    Cet appendice relate principalement le passage au calendrier grégorien dans les principaux pays et régions dont sont originaires nos ascendants. Connaître et étudier l'histoire et la vie de ces derniers font partie du travail de tout généalogiste, car ce travail dépasse ou doit dépasser largement la seule lecture des actes, ou pire le copier-coller d'autres arbres en ligne.
    En France, avec la loi sur la laïcité, une spécificité voire une exclusivité française, l'appartenance religieuse est souvent renvoyée dans une case cachée, alors que plus de la moitié des registres sont religieux. Cependant, la situation est bien distincte dans les pays et régions voisins de cultures germaniques (Alsace incluse).

     


    L'exemple des Schürch


    En Alsace...

    L'usage de variantes dans les patronymes par les anabaptistes suisses (Täufer), en l'occurrence des mennonites et des amish, existe depuis leur émigration dès le XVIIe siècle. Ainsi, pour les Schürch, on note des différences dans les variantes selon la région, mais uniquement chez certains émigrants. Ces variantes peuvent affecter jusqu'à chaque enfant au sein d'une même famille, au point que chaque enfant peut porter un nom dérivé différent. En revanche, des familles mennonites émigrées de Suisse en Alsace et Comté de Monbéliard n'ont pas modifié leur nom originel, comme les Graber, Roth, Amstutz... (Emig, 2014b).

    En fait, aucun des émigrés mennonites Schürch n'a gardé l'écriture du patronyme original : or, sous ce patronyme existait (et existe toujours) une vingtaine de familles protestantes en Suisse (principalement dans le Canton de Berne) sans lien de parenté les unes avec les autres. A partir de 1794, ces variantes ont été soumises à la loi française du 6 Fructidor an II (23 août 1794).

    • Schirch, Schürch, Schirck : au XVIIIe siècle dans la Principauté de Montbéliard
    • Churc, Chure, Churq, Churque, Schirch, Schurck, Schurque, Surcke, Surque, Schink, Schürk : dans le Territoire de Belfort et le Sundgau.
    • Schurch, Schircker, Schirger : au XVIIe siècle dans le Sundgau près de Muhlhouse.
    • Cheric, Cherich, Cherique, Chirk, Gerig, Goerig, Kerique, Koerique, Scherich, Scherig, Scherik, Scherique, Schir, Schirch, Shirck, Schirk, Schirsch, Schoerich, SchoerSchurch, Schircher, Schirher : au XVIIe siècle dans la seule vallée de la Bruche.

    De telles variations patronymiques ne se rencontrent que dans les familles anabaptistes, alors que, dans les familles catholiques ou protestantes, les changements sont mineures pour un nom donné. Ceci est également valable dans les familles Schürch catholiques en Alsace, généralement originaires du canton catholique de Luzern (Lucerne).

    Des recherches ont été faites pour tenter de trouver une explication auprès des descendants, mais sans succès. Dans des registres du Doubs, les patronymes mennonites sont inscrits avec leur variante (ce qui ne se produit jamais pour les autres patronymes). Marthelot (1950) propose comme explication : « on a pu noter les déformations subies par les noms de famille mennonites, de consonance germanique, dans ces pays de langue romane. » Or, les familles mennonites se sont installées de préférence dans ou près de villages germanophones, à l'exception du territoire de Belfort et de la partie romanophone du Sundgau, où cependant existent de nombreux patronymes à consonance et écriture germaniques. Même dans la vallée de la Bruche, les cantons de Saales et de Schirmeck étaient germanophones au sein de la Principauté de Salm-Salm romanophone. Il est néanmoins certain que des patronymes ont été francisés, comme le remplacement du sch par ch. Les anabaptistes ont maintenu l'usage de l'allemand et du Schwyzerdutch (le suisse allemand d'origine alémanique comme l'alsacien), même aux USA avec un dialecte allemand connu sous le nom « Pennsylvania Dutch » (allemand de Pennsylvanie).

    Dans les Vosges, en Lorraine francophone, les noms sont orthographiés sous une forme intermédiaire entre l’écriture suisse allemande initiale (Rupp – Roupe) et le français mais pas encore de manière définitive (Gueingerich va devenir Gingry). Francisé à l’oreille par l’officier d’Etat Civil, un nom revient parfois à son orthographe germanique originelle : Herchi en Hirshi puis Hirschy.

    Il se confirme que ces telles variations patronymiques ne s'observent que chez les anabaptistes en Alsace, et pas dans les familles voisines tant catholiques que protestantes (luthériennes ou réformées). Car, la déformation des patronymes est connue en Alsace liée à l'usage de l’allemand et des dialectes liés, alémaniques et franciques. Les noms étaient transcrits par rapport à ce que les gens disaient. Certains patronymes français ont été germanisés. Mais ces changements s'étalent généralement sur plus d'un siècle, alors que chez les anabaptistes les déformations sont intra-générationnelles.

    En Amérique...

    « Il y a [y aurait ?] quelques 62 façons différentes d'écrire le nom Schürch en Amérique du Nord » selon un relevé fait aux USA et Canada (Tabl. 7) ; mais il y a aussi deux autres variantes en Alsace, non représentées, comme Schicker ou Schirger.

    Tableau 7. – Représentation picturale de l'ensemble des variantes américaines du nom de famille suisse Schürch [présentée lors du Schürchtreffen 2010 de la SGNS -  Schweizerische Gesellschaft der Namensträger Schürch).
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    Il s’agit là de noms de famille dont beaucoup n’ont aucune relation de parenté et n’en ont jamais eu. Il y a là un amalgame propice à des erreurs généalogiques, j’en ai traitées au grand désespoir d’américains. Par ex., Schorch, Schorg, Schurg, Schurig, sont des noms sans origine avec la Suisse, mais d’un immigrant de France ou d’Allemagne. Simplement, tant que le nom exact d’un émigrant du Vieux-Monde vers les Amériques ne peut être certifié par un acte de naissance officiel, il est illusoire de lui attribuer une ascendance, sauf à se faire plaisir avec de faux ancêtres – plus courant aux USA qu’on ne peut le penser.

    →  dans les branches étatsuniennes...

    Cette multitude de patronymes aux USA fait qu'il devient difficile de connaître la véritable origine de son porteur pour les descendants étatsuniens, mais aussi alsaciens, pire au sein d'une même famille le nom de famille peut changer d'un enfant à l'autre. Ceci est évidemment surprenant pour des émigrants tellement fiers de leur origine, et pourtant il est parfois impossible d’assurer que les ascendants sont des Schürch de Suisse. La cause de ces changements patronymiques avait été "simplement" expliquée par le fait que : « Quand les Schürch de Suisse débarquèrent dans la colonie de Pennsylvanie, qui été gouvernée par les Britanniques, les noms à consonance germanique étaient souvent modifiés par les Officiers qui parlaient anglais et qui n'étaient pas familiers avec les noms  allemands. Aussi, certains changements ont été observés à cause de l'alphabet anglais, où par exemple le 'ü' n'existe pas. »

    La tendance pour les familles descendants des Schürch de Sumiswald, installées en Pennsylvanie (USA) dès leur immigration depuis la Suisse, a été d'utiliser comme patronyme Sherk ou Shirk, ou les deux au sein d'une même famille ! Aujourd'hui, on relève principalement les patronymes Sherk, Sherick, Sherrick, Shirk pour les descendants américains des Schürch de Sumiswald et seulement Schicker ou Schirger en Alsace (mes ancêtres - ma grand-mère suissesse est une Schürch née à Huttwil).

    → dans les branches canadiennes...

    La première génération de la famille de Joseph Sherk (1769-1853) (issu de Joseph Schürch de Sumiswald Code-H), qui a émigré au Canada (Waterloo Co, à l'ouest de Toronto) se faisait nommer Schoerg ou Schorg. Ensuite, Joseph apparaît dans les registres de 1842 et 1851 sous Sharick, alors que lui-même se faisait nommé “Joseph Shorg”. En fait, il était notoire que, lors des recensements, l'employé notait le patronyme selon la prononciation et non comment il était épelé. Un des frères de Joseph et ses descendants se faisaient appelés Sherrich ou Shirk.
    Le fils de Joseph, Samuel, puis ses descendants (au Canada et dans le Michigan, USA) se sont fait appelés Sherk. Un autre fils Jacob a gardé le nom de Sharick, mais ceux de ses descendants partis au Michigan se sont fait appelés Shirk, tandis que ceux qui sont restés au Canada ont fini par se faire nommés Sherk, sauf Caleb (né en 1869), petit-fils de Jacob.

    La similitude des variantes américaines avec celles observées en Alsace laisse à supposer que ces dernières, plus anciennes, ont servi de modèle aux émigrants vers les Amériques. En outre, ils transitaient par les cantons de Bâle, puis par l'Alsace, en navigant généralement sur le Rhin vers des ports de la mer du Nord pour l'embarquement sur des voiliers en partance vers la Pennsylvanie.

    Car, en Europe...

    Entre pays latins et pays anglo-saxons européens, les traditions de patronyme sont un peu différentes mais strictes, car le patronyme exact détermine l'appartenance à sa famille, à ses ascendants et ceci déjà dans les registres paroissiaux et auparavant dans les registres notariaux (1200-1500), bien avant la mise en place des registres d'Etat-Civil. L'enfant se référait au nom de son père. En effet...

    Au Moyen-Âge, chaque enfant recevait un nom de baptême : c'était son nom véritable, celui qui identifiait sa personne. Aussi, pour le désigner entre plusieurs portant le même, on ajoutait « fils ou fille de... » selon construction utilisant le génitif. A partir du XVe siècle, un long processus de fixation des noms de famille s'amorce. Ce Beiname devient donc le patronyme, mais le nom de baptême restera primordial jusqu'au XVIIe siècle - mais ceci est encore en cours dans les pays anglo-saxons (given name/christian name vs surname/last name/family name), et, comme dans les pays germanophones, le(s) prénom(s) précède(nt) le nom de famille.
     

    En France, le prénom est joint au nom patronymique pour distinguer les différentes personnes d'une même famille. Les variantes sont mineures et le patronyme est définitif dès 1794 après la mise en place des registres d'Etat-civil, remplaçant les registres paroissiaux.

    En Suisse, il faudra attendre que Napoléon Ier transfère l'état-civil des églises aux structures laïques en créant la Confédération Helvétique, pour fixer définitivement les patronymes !

    Pourquoi ce besoin de changement patronymique...

    Si, comme le reconnaissent nos cousins « Schürch » d'Amérique, on ne connaît pas la raison du changement de patronyme, il est fort possible que, sans en exclure la possibilité, le changement de nom dût avoir une cause plus profonde que seulement une « américanisation » du nom Schürch, puisqu'on retrouve la même tendance en Alsace de langue allemande (alémanique comme la Suisse). En revanche, les familles alsaciennes de mes grands-parents paternels Wohlhüter, Sturm et Nadelhoffer ayant de nombreuses branches aux USA issues de l'émigration aux mêmes époques ont toutes gardé leur nom jusqu'à ce jour sans aucune altération.

    Peut-on penser à un changement de nom volontaire lié aux conséquences d'une fuite ou d'un exil forcé de la mère-patrie pour convictions politico-religieuses. Le débat est ouvert, d'autant que les Schürch de Suisse eux n'ont pas modifié leur nom depuis le XIVe siècle.

    Les patronymes alsaciens Schirch, Schirck, Schirk, Schurck, sont-ils tous des variantes du nom Schürch ?

    Rien n'est moins sûr, au moins en Alsace. En effet...

    • Schirch ou Schurck peut avoir pour racine "schirge", signifiant en alsacien pousser ou glisser. La personne ainsi désignée aurait pu avoir un fort caractère d'opposition.

    • Schirch est une forme germanique du nom de baptême Georg, sans doute influencée par le slave. On trouve également, avec le même sens, les patronymes Schirach, Schira(k), Schiro(k), Schirck, Schirk.

    Certes, les variantes pour les familles dont l’origine est bien établie par les actes, ne posent évidemment aucun souci de parenté. Mais, à l’inverse, un nom ne peut, sans preuve écrite, être considéré comme variante d’un nom donné. Il faut aussi reconnaître que cela touche à l’affectif et l’envie d’y croire finit parfois par prendre le dessus sur la réalité. Les exemples ne manquent pas et les descendants outre–atlantiques se montrent assez friands.

    Pourtant, seules les variantes patronymiques apparues dans un arbre généalogique donné ont un intérêt ; ce ne sont généralement que de simples fluctuations orthographiques. Introduire d'autres, non pertinentes, ne pourrait que provoquer inutilement la confusion dans la base de données, et plus si celle-ci est mise en ligne.


     


    Emig C. C., 2021. De la généalogie protestante en Alsace... quelques remarques et conseils.
    Nouveaux eCrits scientifiques, NeCs_01-2021, p. 1-10 [2e édition].

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    Mise en ligne le 25 juin 2021 - 2e édition - © Christian C. Emig - Nouveaux eCrits scientifiques